Compte rendu
« Ve 1.1.2016. Debout à sept heures. La vallée est noyée de brume. Je transcris les quelques lignes où tient la journée d’hier et expédie les notes de décembre à Michèle Planel. » C’est ainsi que s’ouvre le cinquième tome du Carnet de notes de Pierre Bergounioux, couvrant les années 2016 à 2020. Les dernières lignes de décembre 2015 envoyées à son éditrice chez Verdier, le diariste obstiné reprend « le crayon » le jour de l’an pour continuer à « garder trace du temps », tâche qu’il s’est imposée en 1980 et dont depuis il s’est acquitté sans interruption. Rien d’exceptionnel à noter le quotidien pour lutter contre l’oubli, mais pour Pierre Bergounioux l’enjeu est plus spécifique, ses contraintes sont rigoureuses, le résultat − quarante ans de vie évoqués au jour le jour en près de 5600 pages − est vertigineux. Dès l’ouverture du premier Carnet, l’auteur relie la décision de tenir un journal au motif, bien connu des lecteurs de son œuvre, d’une vie scindée en deux parties : celle de l’espace et du temps de son enfance d’avant dix-sept ans, une vie vouée aux choses, immergée dans la sensation, et celle de « l’exil » dans la grande banlieue parisienne, la vie avec et dans les livres qu’il a choisie quand il a quitté la Corrèze, sa province natale. La décision prise, en 1966, à l’âge de dix-sept ans, lui a dicté de vivre le reste de sa vie en connaissance de cause, dictat désigné par la suite comme « la règle de fer » ou « la loi d’airain ».
Manet van Montfrans, « Compte rendu : Pierre Bergounioux, Carnet de notes, 2016-2020 », Éd. Verdier, 2021. RELIEF – Revue électronique de littérature française, vol. 17, n0 1, 2023, p. 177-182. RELIEF – REVUE ÉLECTRONIQUE DE LITTÉRATURE FRANÇAISE (revue-relief.org) doi.org/10.51777/relief17716.